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    20 juin 2023

    L’œuvre poétique de Louise Labé

    L’œuvre poétique de Louise Labé

    Louise Labé est une autrice présumée du XVIe siècle. Présumée, car certains chercheurs estiment qu’il s’agit d’une création littéraire. Parlons d’elle pour le moment comme d’une poétesse réelle : elle appartient au mouvement de la Renaissance et plus précisément à ce que nous appelons l’école lyonnaise. Si son œuvre se résume à peu, elle dénote toutefois avec la culture de l’époque.

    Qui est Louise Labé ?

    D’abord, traitons de Louise Labé. Elle serait née à Lyon entre 1516 et 1523. Elle vient d’une famille de cordiers assez riche et le père offre à sa fille une éducation intellectuelle à l’italienne. En effet, si elle apprend la broderie, la chanson et le luth, elle reçoit également une instruction en langue latine et italienne. Elle monte aussi à cheval et pratique les armes.

    Louise Labé se serait mariée à Ennemond Perrin, probablement autour de 1540. Elle serait aussi l’amante d’Olivier de Magny qui appartient lui aussi à l’école lyonnaise. À cette époque, les femmes participent à la vie artistique et au débat des idées sur le modèle italien. On parle alors de cortigiane honeste . Quand la vie mondaine de Lyon s’éteint un peu, elle s’efface également de la scène publique.

    Louise Labé, une invention littéraire ?
    Mireille Huchon, directrice de l’UER de Langue française en Sorbonne, tente de démontrer que Louise Labé n’est qu’une invention. Selon sa théorie, les quelques sonnets et l’unique texte en prose retrouvés de cette autrice ne seraient que la production du cercle de Maurice Scève. Elle va jusqu’à dire également que Pernette du Guillet et Jeanne Flore sont également des inventions. Si vous souhaitez en savoir plus, vous pouvez lire son ouvrage Louise Labé, une créature de papier publié en 2006.

    L’œuvre de l’autrice de la Renaissance

    En ce qui concerne son œuvre, elle se limite à peu de choses. Elle se constitue à l’heure actuelle de 24 sonnets, 3 élégies, un discours en prose et peu de choses encore. Sa poésie, parue en 1555, aurait été rééditée l’année suivante. Ce que nous pouvons noter également est que ce petit recueil est constitué pour moitié de la poésie de l’autrice et pour le reste, il comporte un ensemble d’hommages poétiques de ses contemporains.

    Elle écrit une poésie amoureuse, à la façon des hommes écrivant pour leur muse. Ici, nous supposons que c’est Olivier de Magny la muse de Louise Labé. Elle aurait eu un commerce amoureux avec cet autre poète qu’elle a pu fréquenter dans le cercle des poètes lyonnais. Toutefois, elle aurait pu également avoir d’autres amants et il est fort probable que d’autres hommes lui aient servi de muse.

    Sa littérature, qu’elle soit une figure réelle ou imaginée, reste porteuse de sens. En effet, la préface de son recueil dédié à Clémence de Bourges invite les autres femmes instruites à suivre ses pas et proposer à la lecture leurs poésies. Comme un manifeste féminin de la littérature, elle tente également de prendre son rôle de femme de lettres et ainsi, de hisser la femme comme étant l’égale de l’homme. Elle devient ainsi la porte-parole des dames lyonnaises à qui elle s’adresse.

    Extrait épitre dédicatoire, Louise Labé - Culture Livresque
    L’épitre dédicatoire de Louise Labé revêt une signification importante dans la littérature du XVIe siècle. Il permet de mettre en avant les figures féminines et surtout les femmes de lettres qu’elle incite à écrire...

    Une poésie nourrie par la tradition amoureuse de la Renaissance

    La poésie de Louise Labé est donc une poésie amoureuse. Le désir féminin y trouve sa place, à la fois brûlante et douloureuse. Sa poésie reprend principalement le thème de la plainte amoureuse, comme elle existe dans le pétrarquisme et le néoplatonisme.

    Pétrarquisme et néoplatonisme dans la poétique de l’autrice…

    D’abord, le pétrarquisme fait de la dame un être supérieur par rapport au poète (généralement un homme, donc…) qui n’est là que pour lui offrir la gloire immortelle par sa poésie. Sur le modèle de l’amour courtois, les amants doivent se soumettre à certaines étapes amoureuses pour bien accomplir leur relation. Les étapes de cette relation se terminent au moment du don de mercy, qui équivaut au don de soi par la relation charnelle. Toutefois, la poésie de Louise Labé, si elle exprime le désir de l’autre, ne semble pas avoir pour objectif cette liaison. Une autre conception de l’amour s’intègre alors à cette première vision de l’amour.

    Cette autre théorie amoureuse importante est le néoplatonisme. Ici, le but auquel temps l’amour est l’harmonie. Il existe trois points de beauté à atteindre pour un amour idéal. Le premier est la beauté de l’âme, le second la beauté du corps et enfin la beauté de voix. La beauté de l’âme reflète l’intelligence de l’être adoré. Ici, il n’existe pas de don de mercy, il est même interdit, car elle romprait l’harmonie recherchée. D’ailleurs, les plaisirs du goût, du toucher et de l’odorat sont interdits. Elles sont considérées comme des voluptés violentes qui troubleraient la beauté d’âme. Enfin, si dans le pétrarquisme, la femme est à l’initiative de la relation, ici c’est l’homme qui est à l’origine de la relation, mais c’est la dame qui mène le jeu et provoque le désir (plus qu’elle n’en est l’objet).

    Comment les traditions amoureuses se mélangent-elles de l’œuvre ?

    Le pétrarquisme et le néoplatonisme trouvent leur place dans la poésie de Louise Labé. Le pétrarquisme se retrouve dans la tradition courtoise menant vers une idéalisation de l'amour, le néoplatonisme se retrouve dans la théorie même de l'amour. La poésie a donc pour rôle de faire entrer dans la postérité l’amant, tout en amenant également la gloire sur l’auteur de la poésie. Elle évoque également à de nombreuses reprises les dieux relevant de cette tradition amoureuse et le luth, instrument de l’amour. Ces références permettent d’extérioriser l’érotisme de l’autrice sans présenter ouvertement le désir.

    Toutefois, si la poésie laisse place au désir, il est proscrit d’y accéder. Nous sentons dans la poésie de Louise Labé une tension la menant à faire taire le corps pour avoir accès à cet amour spirituel espéré dans le néoplatonisme. Ainsi, les images de ces deux poésies se retrouvent ensemble dans l’œuvre de l’autrice, menant à un idéal d’amour spirituel guidé par la plume féminine de la poétesse.

    Les thèmes et les leitmotivs de la littérature de Louise Labé

    Parmi les métaphores et les lieux communs pétrarquistes qu’utilise Louise Labé, on retrouve les flèches, le poison, les plaies, les antithèses violentes, les regards et le mal d'amour. Enfin, c’est  l'immédiateté de la blessure amoureuse qui compte plus que l’amour en lui-même.

    Elle procède souvent à des jeux à l’aide d’antithèses et d’oxymores qui expriment l’état insupportable de l’amour et du désir. Ainsi, elle affirme la voix d’une femme ressentant le désir amoureux de la même façon qu’un homme. En effet, pas de romantisme ici : la femme subit l’amour de la même façon que les hommes et les lecteurs doivent l’entendre.

    Enfin, pour faire le tour des thèmes principaux de la littérature de cette poétesse, nous pouvons en faire une liste :

    • L’amour est douloureux (physiquement et psychologiquement) ;
    • la mort qui viendra et séparera de l’être aimé (attention, la vieillesse n’est pas un sujet de sa littérature et semble ne pas vraiment exister) ;
    • le besoin de voir l’être aimé, la recherche de sa présence ;
    • la célébration de l’autre (évoque quelque peu son corps, mais sans le décrire, elle semble plutôt le garder pour ses souvenirs personnels) ;
    • l’amour trouve sa réalisation la plus complète dans le rêve, qui est aussi le seul moment de repos.

    Citations

    Quand vous lirez, ô Dames Lyonnoises,
    Ces miens écrits pleins d'amoureuses noises,
    Quand mes regrets, ennuis, dépits et larmes
    M'orrez chanter en pitoyables carmes,
    Ne veuillez point condamner ma simplesse,
    Et jeune erreur de ma folle jeunesse,
    Si c'est erreur. Mais qui dessous les Cieux
    Peut se vanter de n'être vicieux ?
    Elegie III
    Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
    J'ai chaud extrême en endurant froidure ;
    La vie m'est et trop molle et trop dure ;
    J'ai grand ennuis entremêlés de joie
    Sonnet 8
    Baise m'encor, rebaise-moi et baise ;
    Donne m'en un de tes plus savoureux,
    Donne m'en un de tes plus amoureux,
    Je t'en rendrai quatre plus chauds que braise.
    Sonnet 18

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    // lastname: Labé // firstname: Louise // title: Oeuvre poétique