Résultats de votre recherche :

    24 mai 2022

    Les dames de Kimoto de Sawako Ariyoshi

    Les dames de Kimoto de Sawako Ariyoshi

    Les dames de Kimoto est un ouvrage de littérature japonaise écrit par Sawako Ariyoshi. Sa plume, comparée à celle de Simone de Beauvoir, nous laisse percevoir une réflexion autour de la condition de la femme et des normes sociales qui lui sont imposées de la fin du XIXe siècle à l'après-guerre en nous permettant de suivre trois générations de femmes qui vivent chacune à leur manière et selon leur époque leur rôle de femme, d'épouse et de mère.

    Les dames qui Kimoto en résumé

    Les dames de Kimoto raconte l'histoire d'Hana, une jeune femme qui va épouser un homme que lui a choisi sa grand-mère et ainsi, elle apprend à renoncer à sa propre famille pour être totalement intégré à celle de son mari. C'est tout du moins ce que veut la tradition, puisqu'elle renonce avec une grande tristesse au lien qui l'uni à sa grand-mère.

    Cette femme va alors tout faire pour être la meilleure épouse, brue et mère possible. Mais cette tâche n'est pas aisée et sa fille, Fumio, lui reprochera son dévouement pour son mari alors même qu'elle est aussi dévouée pour ses enfants.

    C'est alors que le conflit sur la condition de la femme dans la société japonaise de la fin du XIXe jusqu'à l'après-guerre éclate car, après avoir suivi étroitement le destin de femme mariée d'Hana, nous découvrons plus amplement la façon dont sa fille perçoit la femme et son rôle dans la société avant qu'elle ne soit elle-même confrontée à l’évolution du rôle de la femme à l'époque de sa propre fille.

    Les femmes à l'honneur dans une société patriarcale

    Ce roman relate donc l'histoire de trois femmes d'une même famille mais de générations différentes avec les soucis de leur époque. Elles questionnent, chacune selon le filtre de leur temps et de leur éducation, la condition de la femme et le rôle qu'elles ont à jouer dans la société.

    Première génération : le dévouement de la femme

    Nous partons donc de Hana, élevée pour être une bonne épouse et dans la plus grande tradition, belle qu'elle ait eu la chance de faire des études supérieures, ce qui la rend plus sensible aux enjeux sociétaux de son époque et à ce qui se fait à l'étranger que la plupart de ses congénères.

    Nous suivons son histoire, de son mariage avec un homme politique en devenir à la naissance de ses enfants et petits enfants. Pour elle, l'important est d'être la meilleure mère possible ainsi que la meilleure épouse imaginable en apportant un soutien sans faille à sa famille.

    Deuxième génération : lutter pour l'égalité des droits et l'émancipation de la femme

    Sa fille, Fumio, que nous suivons dans la seconde partie du roman, lui reprochera ce qu'elle perçoit comme de la soumission. Elle est révoltée et son sens aigu de la justice n'arrange rien.

    Pour elle, la femme doit se libérer du mari et elle luttera toute sa vie pour l'égalité des sexes. La société se trouve alors au balbutiement de la "libération" de la femme et l'engagement des jeunes filles à la recherche de réponses à leurs questions promet de nombreuses évolutions. Mais nous n'en sommes encore qu'au début de ce qui sera plus tard une lutte féministe.

    Cela crée une tension entre la mère et la fille mais aucune des deux n'acceptera jamais totalement la façon de penser de l'autre. Pourtant, toutes les deux s'interrogent sur la condition de la femme et traversent leur époque avec les pensées de leur temps.

    Troisième génération : un compromis face à la question intergénérationnelle

    Enfin, nous découvrons Hanako, la fille de Fumio. Celle-ci est proche de sa grand-mère bien qu'elle vive souvent de nombreuses années à l'étranger car elle doit suivre son père et sa mère. Elle ressemble d'ailleurs assez à sa grand-mère dans sa façon de penser aux choses et à la culture. Elle n'a pas le comportement révolté de sa mère mais n'hésite pas non plus à avoir son propre avis.

    C'est ce qui la conduit à trouver un entre-deux entre la pensée de sa mère et la conception de la femme de sa grand-mère. En effet, si elle ne proclame pas des discours grandiloquents comme sa mère sur la condition de la femme, elle agit tout de même comme une femme plus libre et le célibat tardif ne l'inquiète pas. Elle travaille, elle gagne sa vie et parvient à le faire accepter de sa grand-mère.

    Pourquoi ? Probablement car, contrairement à Fumio, Hanako est douce et ne rejette pas la culture de sa grand-mère sous le prétexte que sa mère est féministe. Cela conduit d'ailleurs souvent à une incompréhension de la part de Fumio. Mais elle vit sa vie et est libre de faire ce qu'elle veut, ce qui démontre que les choses évoluent tout de même et qu'une certaine perception de la femme n'est plus en question.

    La question du lien, de la famille et des rapports intergénérationnels

    Ce qui traverse ce récit, ce n'est pas simplement la question de la condition féminine. Au fur et à mesure des pages, nous découvrons aussi une véritable réflexion autour de ce qu'est la famille, de la façon dont l'héritage se transmet et du regard qu'a une génération sur une autre.

    Le lien intergénérationnel dans Les dames de Kimoto

    Le lien intergénérationnel dans Les dames que Kimoto se traduit de plusieurs manières. Hana admirait sa grand-mère Toyono, tout comme Hanako admire sa grand-mère Hana. Mais les relations entre les filles et les mères semblent plus complexes. Dans cette œuvre, nous n'avons que deux modèles de relation mère-fille développé : celle de Hana avec Fumio et celle de Fumio avec Hanako.

    La privation de la mère d'Hana dans le récit contribue certainement au développement de cette thématique puisqu'Hana ne comprend pas la distance de sa fille vis-à-vis d'elle alors qu'elle était proche de Toyono. Mais voilà : elle a connu un rapport privilégié avec sa grand-mère et non pas avec sa mère.

    Ainsi, Hanako parvient à formuler à sa grand-mère l'idée que la fille ne peut pas être aussi proche de la mère que de la grand-mère. Et qu'à son tour, lorsqu'elle aura une fille, elle préférera Fumio à elle. Cela est tout simplement une question de génération et de lien avec l'autorité.

    L'évolution de la famille au fil des générations

    Mais la question de la définition de la famille se pose aussi pour les trois femmes que nous suivons. Fumio se demande tout le temps ce qu'est vraiment la famille et ne parviendra peut-être jamais tout à fait à trouver des réponses à ces questions. Cela explique le rejet de sa mère à la fin de ses jours, bien qu'elle revienne l'assister de temps en temps. Ce qu'elle ne supporte pas, c'est l'image de cette famille qui s'est déconstruite, à la fois par les mariages respectifs qui ont séparé la fratrie que par la déflagration politique et économique de ce que représentaient les Matani.

    En effet, ils perdent tout : pendant la guerre, les fils se dirigent vers la famille de leur femme plutôt que vers leur mère (contrairement au renoncement à la famille de la femme à l'époque de Hana) et seules les femmes retournent vers leur mère. Mais avant ça, toute la famille a laissé la fortune et la réputation des Matani se perdre. Le mot famille a perdu de son sens et il ne reste plus que les traces d'un ancien lien perdu lorsque la mère arrive à la fin de sa vie.

    Avec le temps, chacun a appris à vivre pour soi en oubliant les traditions et sans penser à l'honneur, notion essentielle à l'époque d'Hana. Les personnages sont alors confrontés à une autre vision de ce que peut être la famille et chacun doit trouver de nouveaux repères, en tout cas ceux qui s'en inquiètent.

    Ce livre amène donc le lecteur à mener sa propre réflexion autour de la notion de famille, de la façon dont elle a évolué et du lien qui subsiste entre les générations d'une même famille. Cela laisse de quoi penser à la façon dont nous percevons nous-même ce lien familial et à se demander ce que ressentent nos aînés par rapport à cette vision des choses qui nous est propre !

    Citations

    Hana avait fréquenté l'école de jeunes filles de Wakayama. On lui avait inculqué le code moral confucéen à l'usage des femmes, l'Onnadaïgaku. Elle était convaincue que le rôle des femmes était d'assurer dans le mariage la descendance de la famille du mari.
    À l’époque, il était courant que les jeunes filles fussent déjà mariées à quatorze ou quinze ans. Depuis qu’elle en avait plus de dix-huit, Hana était devenue une source de préoccupation pour les siens. Cette fois, Nobutaka était bien résolu à ne pas laisser l’affection de Toyono pour Hana menacer l’avenir de la jeune fille.
    Le spectacle de Hana passant du noir sur les dents de Yasu à côté du brasero dans la salle de séjour apparaissait à Fumio comme une caricature du rôle des femmes et de la vie de famille.
    "Ne vous moquez pas de moi. Un jour je me marierai, j'aurai une fille et cette fille se révoltera contre moi et sera pleine d'affection pour sa grand-mère. Les gens ont vécu dans le passé lointain et,  pour qu'ils continuent à vivre dans les temps à venir, si difficile que puisse être pour moi le présent, je dois le vivre pour que demain existe."

    Si ce livre vous intéresse :
    Sinon...
    Analyse de La Cerisaie d’Anton Tchekhov - Culture Livresque
    Tchekhov écrit La Cerisaie un an avant sa mort alors qu’il est malade. La rédaction de cette pièce qu’il veut comique lui est difficile. Il y présente un témoignage d’une époque de dépression et de désillusion...
    Vous pouvez découvrir La Cerisaie d'Anton Tchekhov qui révèle aussi la façon dont une autre famille perd pied.
    // lastname: Ariyoshi // firstname: Sawako // title: Les dames de Kimoto