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    21 février 2023

    La horde du contrevent par Alain Damasio

    La horde du contrevent par Alain Damasio

    La Horde du contrevent demeure le livre qui a propulsé Alain Damasio sur l’avant de la scène. Œuvre de science-fiction par excellence, il y décrit un monde déchiré par les vents, presque invivable, où des héros tentent de trouver une zone plus habitable ou au moins l’origine des vents. Plus qu’un simple roman de science-fiction, Alain Damasio en fait également une œuvre philosophique sur le sens de la vie.

    La Horde du contrevent en quelques mots

    Il est difficile de résumer sans trop en dire La Horde du contrevent tellement il y a de choses à dire et dont nous pourrions discuter. Je vais donc essayer de faire court. Nous nous situons dans un monde balayé par les vents. Pour vivre, les hommes doivent se cacher derrière de solides murs, construits dans une matière particulière. Certains décident de vivre autrement, mais ils meurent souvent des rafales incroyablement puissantes ou des conséquences de celles-ci. Nous le savons très vite, les 9 formes du vent sont sans pitié.

    Dans ce monde, quelques hommes sont également formés par ce qui s’apparente aux politiciens de ce monde, ou tout du moins la puissance décisionnaire agissant plus ou moins dans l’ombre, pour trouver l’origine du/des vent/s en espérant l’existence d’un monde plus doux où vivre. Chaque génération voit ainsi sa horde apparaître, avec une spécialité différente pour chaque membre de l’équipe (diriger, contrer, porter, faire du feu, chasser, cuisiner, soigner, etc.).

    Leur vie entière est ainsi dédiée à la recherche d’une connaissance supplémentaire, chaque horde voulant aller plus loin que la précédente. Il faut également se dire que certains contrent à pied, comme la trente-quatrième horde dirigée par le neuvième Golgoth. D’autres peuvent utiliser des machines pour s’approcher au plus près et au plus vite de ce qui s’apparente au bout du monde. Toutefois, personne ne semble encore parvenu au bout du monde. Cette horde reconnue sera-t-elle la première à découvrir toutes les formes du vent, ou la fin de cette terre ? Est-ce une quête vouée à l’échec ? Seul le scribe pourra laisser une trace de ce qui s’est passé.

    La horde du contrevent ou une quête sur le mode de l’absurde

    Des règles imposées qui ne prennent pas en compte l'évolution

    La horde du contrevent semble retracer une quête absurde. En effet, ce roman d’Alain Damasio raconte une quête qui n’a encore jamais abouti, avec un savoir encore trop peu développé. Tout ce qui paraît intéresser les puissants de ce monde apocalyptique est la connaissance du vent. Ils ne cherchent pas à développer leurs compétences pour aider des populations qui vivraient hors des murs de leurs enceintes.

    Il y a alors ceux qui restent cachés derrière de solides murs, ceux qui semblent condamnés à une mort certaine par manque de moyen et par l’absurdité de leurs constructions devant les protéger. Enfin, il y a les différentes hordes qui contrent le vent, qui font face dans l’espoir d’aller toujours plus loin. Pourtant, depuis des générations, aucune horde ne semble avoir atteint l’objectif fixé. Tous sont morts ou portés mystérieusement disparus. D’ailleurs, dans ce monde de l’absurde, on continue d’envoyer des hommes à pied lutter contre le vent.

    Alors cela a du sens pour comprendre toutes les formes du vent, mais cela en a-t-il toujours à partir du moment où on vous interdit l’utilisation de machines de transport ? Cela revient à faire un pied de nez à toutes les innovations technologiques qui devraient pourtant permettre d’atteindre le monde souhaité plus rapidement. La quête en elle-même est louable, mais peut-elle véritablement prendre sens lorsqu’on condamne une partie de la population pour peu de résultats ?

    Chacun trouve le sens qu'il peut dans cette quête

    Dans cette quête du non-sens (ou peut-être s’agit-il surtout de lutter et de continuer à aller de l’avant ?), chaque membre de la horde cherche un sens à la quête qu’ils ont entreprise. Pour certains, le principal objectif reste de trouver un lieu pour vivre, une sorte d’El Dorado sans vent destructeur. Ils espèrent ainsi trouver un lieu où vivre. C’est le rêve qui demeure leur moteur tout au long de ce voyage d’une difficulté sans nom.

    Pour d’autres comme le chef de la Horde, le grand Golgoth, la rudesse de la quête mêlée à une forme d’ego reflète tout ce qui compte vraiment. Il veut affronter le vent, aller plus loin que son père avant lui et que toutes les autres hordes. En quelques mots, il tient à être le meilleur plutôt que d'obtenir toutes les réponses attendues. Ceux-là avancent pour la gloire.

    Enfin, il y a ceux qui permettent de faire avancer la connaissance autour des vents. L’objectif est de découvrir toutes les formes des vents, peut-être d’en comprendre la cause, mais surtout de savoir ce que cela implique pour soi et pour l’environnement. Tous les vents sont d’ailleurs accompagnés d’étranges phénomènes avec notamment l’apparition de chrones. Ceux-là s’intéressent donc à la connaissance scientifique du monde qui les entoure. Chacun tente ainsi de donner vie à une quête pouvant leur coûter la vie, ou pouvant ne jamais aboutir.

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    Un univers dominé par les vents externes et internes

    La particularité de ce monde relève donc de la violence de ses vents. Le vent peut être physique et extérieur à l’être humain. Il représente ainsi une force à combattre présent sous la forme de rafales de vent destructrices. Elle reflète l’impossibilité de vivre autrement qu’en se cachant derrière des murs ou en contrant de tout son corps. C’est à cause de ces vents que des hordes sont entraînées dans un contexte très difficile et meurtrier.

    De l’autre côté, ce vent n’est pas automatiquement un ennemi. Il viendrait même de l’être et le composerait. Il est donc un allié à comprendre pour aller plus loin, pour développer sa force vitale et les capacités individuelles. Chacun a alors son propre vent, composé de ses propres nœuds qu’il peut apprendre à écouter et à canaliser. Cette forme du vent réside alors à l’origine même de la force vitale de l’être humain. Il n’y a alors plus de vent à combattre, seulement des formes à comprendre à et analyser. C’est peut-être seulement par ce moyen que la quête des hordes prendra fin, mais ça, vous le saurez en lisant le livre… ou peut-être pas.

    Le vent ne gît ainsi pas toujours où nous l’attendons, ni de la forme prévisible. Il est politisé, étudié, affronté. Il est tout autant porteur de mort que de vie (et vous comprendrez mieux cette phrase à l’orée d’une lecture de l’ouvrage). Définitivement, le vent reflète surtout cette recherche de sens que nous souhaitons tous donner à notre vie. Il nous faudra au moins le courage de toute la horde pour trouver les réponses auxquelles nous ne voulons pas nous confronter.

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    Une œuvre intégrale à l’image des autres romans d’Alain Damasio

    J’ai commencé la lecture d’Alain Damasio par Les furtifs

    J’en suis à la fin des "gros" romans d’Alain Damasio. Après avoir découvert Les furtifs grâce à un collègue de travail, je me suis lancée dans la lecture de La zone du dehors avant de terminer par celui-ci. Tout comme Les furtifs, il s’agit ici d’un roman choral monstrueux donnant voix à de très nombreux personnages. Je comprends totalement ce qui a porté ce roman sur le devant de la scène littéraire.

    Pour préciser un peu mon point de vue sur l’ensemble de l’œuvre d’Alain Damasio, je ne regrette absolument pas l’ordre de lecture des œuvres. En effet, j’ai adoré découvrir Les furtifs qui avait une belle histoire, sortant des sentiers battus. Ce que certains addicts de l’auteur ont pu lui reprocher m’a un peu moins gêné, car je ne connaissais pas la plume de Damasio. Cela m’a permis d’apprécier l’ouvrage, bien qu’on lui reproche d’avoir dû faire des compromis pour plaire au plus grand nombre, au prix d’une partie de l’originalité de l’auteur. Il a toutefois su, avec cette dernière œuvre, pousser plus loin sa conception du corps que dans ses autres œuvres, tout en lui offrant quelque chose d’artistique et de complet.

    Je ne regrette pas d’avoir suivi par La zone du dehors. Pourquoi ? Car si j’avais commencé par ce roman, je n’y aurais vu que les défauts qu’il garde (quelques longueurs, des propos politiques qui me dérangent un peu parfois, etc.). Bien que ce soit un excellent premier roman, je ne pense pas que je me serais intéressée à la suite des ouvrages. Si j’avais terminé par celui-ci, j’aurais gardé une petite pointe de déception, sûrement, face à la qualité des deux autres ouvrages. Alors que l’avoir lu en second m’a au contraire ouvert sur la vision politique de l’auteur, tout en me permettant de trouver plus facilement les motifs récurrents dans l’œuvre d’Alain Damasio (lutte politique, quête de sens et de connaissance, recherche de soi, questionner ce qui nous échappe, etc.). D’ailleurs, le style s'y trouve moins extravagant et on sent une véritable évolution entre son premier et son dernier roman.

    Terminer par La horde du contrevent, l’apothéose de l’œuvre d’Alain Damasio

    Je termine donc cette série de gros romans par La horde du contrevent, son deuxième roman qui a fait sensation. J’ai trouvé cet univers plus détaillé que celui décrit dans Les furtifs. Il est également extrêmement différent (tout en gardant ses similitudes) des deux autres univers proposés puisqu’il s’inscrit plus dans la science-fiction (oui, Les furtifs aussi, mais le monde est plus réaliste). On sent également que la multitude des personnages intégrés ne nuit pas puisque chacun trouve sa place et joue son rôle. Avec autant de monde, il aurait été rapide de se perdre, mais au fond, cela n’aurait pu porter préjudice à cette œuvre tellement elle se trouve du côté d’une forme d’absurde et d’une quête de l’impossible.

    Je pense qu’avec La horde du contrevent, Alain Damasio avait déjà atteint la fin d’une quête philosophique tortueuse et longue à accoucher. Il propose des choses différentes dans son dernier roman et je suis plutôt satisfaite d’avoir pu ressentir l’évolution en lisant dans un ordre non chronologique en termes de parution. Alors si je ne devais garder qu’un roman d’Alain Damasio, je ne saurais trop lequel choisir tellement chacun relève d’une grande qualité littéraire. Toutefois, je sais qu’à conseiller à un lecteur, je proposerai à quelqu’un qui aime les lectures plus fluides de lire Les furtifs et pour un monde plus complexe La Horde du contrevent. Enfin, pour une personne qui aime les romans dystopiques très politisés, La zone du dehors fera très bien l’affaire.

    Citations

    On n'était qu'un petit tas de chair frêle en mouvement, soudés un bloc, désunis presque rien, à peine un billot de bois craquelé prêt à fendre sous la rafale, de la sciure à souffler à la bouche. Et tout le monde le savait...
    Moins que d'autres, je ne savais si le but de notre vie avait un sens. Mais je savais, plus que quiconque, qu'elle avait une valeur.
    Lorsqu'on me demandait ce que j'espérais trouver en Extrême-Amont, cette question banale posée mille fois, je répondais maintenant : "J'espère trouver mon visage. Quelqu'un là-haut le sculpte à coup de salves dures. Chaque acte que je fais le modifie et l'affine. Mes fautes le balafrent. Mais peu importe : il se fait ; il m'attend, posé sur un socle. Et je le verrai, comme je vous vois devant moi, comme on se regarde dans un miroir enfin exact. Je verrai ce visage que je me suis fait tout au long de ma vie, juste avant de mourir. Ce sera ma récompense."
    Qu'importe où nous allons, honnêtement. Je ne le cache pas. De moins en moins. Qu'importe ce qu'il y a au bout. Ce qui vaut, ce qui restera n'est pas le nombre de cols de haute altitude que nous passerons vivants. N'est pas l'emplacement où nous finirons par planter notre oriflamme, au milieu d'un champ de neige ou au sommet d'un dernier pic dont on ne pourra plus jamais redescendre. N'est plus de savoir combien de kilomètres en amont du drapeau de nos parents nous nous écroulerons ! Je m'en fiche ! Ce qui restera est une certaine qualité d'amitié, architecturée par l'estime. Et brodée des quelques rires, des quelques éclats de courage ou de génie qu'on aura su s'offrir les uns aux autres.

    Si ce livre vous intéresse :
    Sinon...

    Honnêtement, il est difficile pour moi de trouver un auteur qui pourrait faire l'affaire après la lecture des romans d'Alain Damasio. Je ne peux sincèrement vous rediriger que vers un autre mastodonte de la littérature dystopique, George Orwell, pour continuer vos lectures sur une lancée à couper le souffle.

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    // lastname: Damasio // firstname: Alain // title: La horde du contrevent