Lulu et Nelson, une BD jeunesse sensible

Lulu est Nelson, bande dessinée proposée par Charlotte Girard, Jean-Marie Omont et Aurélie Neyret raconte, sous la forme d’une histoire enchâssée, la vie de Lucia, alias Lulu et de Nelson. Elle raconte cette histoire à sa petite-fille qui doit à son tour trouver sa propre maison au moment d’un déménagement. Entre beauté des images et thématiques intéressantes pour ce thème, parcourons les trois tomes de cette trilogie ensemble.

Résumé de Lulu et Nelson (les trois tomes)

En Inde, une petite fille nommée Lohita s’apprête à déménager pour se rendre à Naples. Ce changement de vie n’est pas pour lui plaire à elle qui aime tant ses éléphants. Sa grand-mère, Lucia, lui écrit alors une lettre pour l’aider à mieux accepter les choses. C’est l’occasion pour elle de lui raconter sa jeunesse.

Lucia que l’on connaît sous le surnom de Lulu a grandi dans un cirque à Naples avec ses parents dompteurs de lion. Un jour, une catastrophe a lieu : tous les lions meurent lors d’un incendie. En réaction à cela, le père de Lucia décide de déménager et de la conduire dans une école pour son éducation. Jusqu’alors, Lucia faisait l’école à domicile.

Lulu n’accepte pas d’abandonner la vie de cirque et cherche une solution pour retrouver des lions et redonner à son père l’envie de s’occuper de ces animaux qu’elle aime tant. Elle embarque alors sur un bateau (illégalement) pour l’Afrique et c’est le début de ses aventures qui commencent.

Questionner le rapport aux animaux grâce à une BD jeunesse

La fin de l’ère des animaux au cirque

Cette bande dessinée offre aux animaux sauvages une place centrale. Ils sont à la source de l’intrigue puisque la petite Lohita ne veut pas quitter ses éléphants et Lucia part en Afrique pour retrouver des lions à dompter. Ce lien entre homme et animal change au fil de l’histoire.

En effet, le début de l’histoire évoque Lucia et sa famille, dompteurs dans un cirque, qui utilisent donc les bêtes pour leur travail. Ils aiment les animaux, ça c’est certain. La perte des lions lors d’un incendie déclenché par un orage aura d’ailleurs de nombreuses répercussions sur l’histoire. Toutefois, dans une société où l’on questionne de plus en plus le bien-être animal, ce premier tome n’a pas manqué de déranger une partie des lecteurs.

Apprendre à apprécier la vraie nature des animaux

Lulu, partie en Afrique sur un coup de tête pour trouver de nouveaux lions pour son cirque rencontre alors une autre culture et une autre façon de voir les animaux. Elle a la chance de voir des animaux évoluer dans leur milieu naturel et apprend à respecter autrement ces êtres vivants. Au fur et à mesure, elle évolue même au point de comprendre que la place des animaux est bien dans leur milieu naturel. Et c’est vivre au contact des lions libres, de pouvoir leur parler et être accepté de la tribu qui contribue à cette évolution.

D’ailleurs, sa petite fille indienne semble plus respectueuse des animaux et vit avec son temps puisque ses éléphants sont en libertés. Bon, après, sachant comment on rend "sociable" les éléphants… un petit doute subsiste sur cette évolution. Toutefois, on peut soit y voir un problème, soit admettre qu’il reste un certain chemin à parcourir, ou espérer que le lien entre ces éléphants et la petite fille vient qu’ils vivent eux aussi dans une réserve qui s’occupe et soigne les animaux.

Des thèmes forts qui marquent une vie autant que l’Histoire

Si la thématique principale demeure le lien d’attachement à l’animal et l’évolution du personnage quant à sa façon de percevoir la place de ces animaux sauvages que sont les lions, d’autres thématiques parcourent également la bande dessinée, faisant de cette histoire le tremplin de plusieurs discussions entre enfants et parents.

La trilogie de Lulu et Nelson reprend la thématique du deuil d’un parent

Comme dans Les carnets de Cerise, cette bande dessinée exploite le deuil d’un parent. Ici, c’est la mère de Lucia qui perd la vie lors d’un spectacle. La dompteuse se fait attaquer par un lion, alors qu’elle tournait le dos à l’animal. C'est en outre ce qui a participé à construire l'intrigue principale, mais on s'attarde peu de temps sur cet événement malheureux.

La thématique, bien moins exploitée que dans l’autre bande dessinée, semble donc relayée au second plan et permet simplement à l’héroïne d’évoluer "sans parent" sur un autre continent que le sien. Le second héros, Nelson, a également perdu sa mère et évolue sans son père. Sur ce plan, les deux personnages se rejoignent sans qu’ils ne semblent vraiment souffrir de l’absence parentale. Nous comprenons alors que le sujet principal n’est pas celui-ci.

Le destin des Noirs ou comment parler de l’Apartheid à un enfant

Ce qui relie le destin de Lulu et de Nelson, c’est également la façon dont le père de Lulu se fait emprisonner. Celui-ci défend un enfant qui se fait passer à tabac par les forces de l’ordre lors d’une manifestation pour l'égalité des Blancs et des Noirs. Il se fait alors attraper par la police et emprisonner. Nelson, reconnaissant, s’occupe ensuite de protéger Lulu et de la conduire près de son amie qui joue le rôle de famille d'accueil pour lui. La chance qu’ils ont, c’est que cette amie est blanche et avocate.

Lulu découvre alors qu’en Afrique, les Noirs subissent le racisme et la ségrégation. Elle découvre les propos de Nelson Mandela, son combat et celui de toute une ethnie à qui on interdit des choses sur sa propre terre. C’est donc une belle occasion pour parler avec ses enfants du racisme, de ses conséquences au quotidien et dans l’Histoire.

D’ailleurs, cette bande dessinée évoque de manière générale la liberté avec une petite fille forte de caractère qui prend des décisions seule et qui évolue également sans l’intervention des adultes. C’est aussi celle d’une femme qui se confronte aux hommes dans la vie de tous les jours et celle des Noirs qui luttent pour leurs droits.

Plusieurs tomes pour une histoire non développée

Lulu et Nelson constitue donc une trilogie de bande dessinée qui plaît tant par le dessin que par les thèmes abordés. Toutefois, je trouve que ces thèmes restent trop superficiels et manque de développement pour une histoire en trois tomes justement. Lire Les carnets de Cerise, qui était en 5 tomes, ne m’a pas du tout dérangé car l’histoire était complète, mais le découpage opéré dans Lulu et Nelson, créant un "suspens" assez dispensable, ne m’a pas convaincue.

J’aurais donc préféré un seul tome plus volumineux, ou trois tomes plus approfondis au niveau de l’histoire. Est-ce que ce choix a été fait pour ne pas décourager un public de lecteurs assez jeune ? Je ne suis pas totalement convaincue par cet argument. Malheureusement, j’ai plutôt tendance à trouver que ce découpage rend moins justice à la beauté des dessins et à la sensibilité poétique de cette bande dessinée. Peut-être qu’une BD composée des trois "chapitres" aurait moins eu pour effet de me donner le sentiment qu’il manque un petit quelque chose à cette histoire somme toute très jolie.

Citations

Mon petit bourdon,
J’ai un secret à te confier…
Une légende ancienne raconte que les petits, dans le ventre de leur mère, connaissent déjà toutes les réponses aux questions sur les mystères de la vie.
Mais on dit qu’à leur naissance, l’ange du silence vient poser un doigt sur leur bouche et leur murmure : "oublie tout ce que tu sais, oublie tout ce qui t’attend sur terre, et découvre la vie par toi-même."
Tome 1 : Cap sur l’Afrique

Dès 1939, en Afrique du Sud, les blancs et les personnes de couleur ne vivent pas avec les mêmes droits. Les inégalités sont courantes. En 1948, les blancs (afrikaners) proclament leur supériorité sur ce qu’on appelle les "non-blancs". L’Apartheid est officiellement mis en place.
Tome 2 : Le royaume des lions

La voiture s’est enfoncée dans la nuit africaine… et Nelson a disparu. Pourtant, il était toujours là. Il me suffisait de fermer les yeux pour le voir.
Tome 3 : La lionne blanche.

Si ce livre vous intéresse :

Sinon...